Petit entête
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Les sœurs des Ecoles charitables du saint Enfant Jésus sous la Révolution.
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La Révolution de 1789, provoquée par une légitime aspiration à la justice sociale a ébranlé la France, l’Europe et le monde. Elle fut déclenchée en France pour des motifs politiques ; des penseurs imaginaient de nouveaux rapports sociaux, remettaient en cause les hiérarchies sociales et même dans certains cas les autorités religieuses. Elle atteignit alors les Ordres religieux. Aussi cette période de la Révolution fut pour l’Institut des sœurs des Ecoles charitables du saint Enfant Jésus un temps d’épreuve, d’audace, de courage et de foi en la Providence. Les premières lois révolutionnaires ordonnent la suppression des voeux de religion, la suppression des congrégations religieuses ! Mais la communauté des Maîtresses charitables inspirée par la sagesse de Nicolas Barré n’était pas un Ordre religieux ; pas de monastères, pas de statut religieux, pas de costume, pas de vœux, pas de propriétés, aucune ressource financière… elles reçoivent simplement des communes où on les appelle un « logis d’école », et un traitement souvent incertain ! Alors partout continuent les Ecoles gratuites, les Ecoles de travail, les petits pensionnats (pour les plus démunis des enfants), à la satisfaction des populations et même des Autorités des communes. Certes les tracasseries ne manquent pas… mais les Filles du Père Barré allient l’audace simple à la souplesse qui s’abandonne à la Providence, dans la fidélité à l’Eglise.
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Toutefois le 12 Août 1792, l’institut est dissous, car les sœurs refusent de signer la Constitution civile du clergé, loi de réorganisation de l’Eglise, soumettant toute initiative religieuse, écclésiale, à l’Etat. Les sœurs se mettent hors la loi, refusent d’accompagner les élèves aux cérémonies du culte célébré par des prêtres ayant signé.
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Dès lors c’est l’expulsion des locaux où se tenaient les Ecoles gratuites, appartenant aux communes ou à de généreux donateurs, eux-mêmes expulsés !
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En province, la population exige parfois le retour des sœurs pour le soin des malades ou les Ecoles car leur remplaçantes révolutionnaires, les citoyennes « montagnardes » se montrent incapables ou trop exigeantes pour leur salaire.
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Malgré toutes les difficultés, les sœurs continuent à s’occuper des enfants, à travailler pour gagner leur vie, à accueillir des « prêtres réfractaires », ceux qui ont refusé de signer la Constitution (ils sont pauvres parmi les plus pauvres). Elles sont confiantes en la Providence.
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Dans toute la région de l’Héraut, la maison d’Agde était devenue une maison rayonnante grâce à la protection de l’évêque et l’estime de la population. Monseigneur de Saint Simon tient en grande estime la supérieure de la maison, Mère Marron. Obligé de se cacher, apprenant le sac de son évêché, il fait appeler la Fille du Père Barré et lui demande de sauver des documents restés dans son évêché.
Le récit de l’expédition conservé aux Archives de l’Institut est pittoresque.
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« - Où vas-tu citoyenne ?
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Je vais à mes affaires, et vous que faites-vous ? à tout saccager, détruire des meubles, brûler des étoffes… Vous êtes tous des lâches et des fous. Vous feriez mieux d’emporter tout cela, plutôt que de le briser. Quel bénéfice retirez-vous des débris que vous amoncelez ?
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Elle a raison la citoyenne ! »
Et elle passe, emportant dans son tablier les documents de l'évêché.
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Les églises étant fermées ou profanées, les sœurs restaient parfois 18 mois sans sacrements, sans communion. Un jour elles donnèrent asile à un « prêtre réfractaire » qui au péril de sa vie, exerçait furtivement son ministère. Il venait de célébrer la messe, et allait se retirer déguisé en bon campagnard, lorsqu’on annonce la venue des révolutionnaires. Mère Marron fait disparaître rapidement tout ce qui a servi à la messe, donne le mot à une pensionnaire de 18 ans et fait passer le prêtre au salon, au même moment les perquisiteurs entraient. La jeune fille se jette au cou du prêtre « Oh, mon père que je suis heureuse de vous voir ! » Les perquisiteurs se croient en présence d’une rencontre de famille, ils admirent la tendresse de la jeune fille à l’égard de son père. En donnant des signes d’affection et le nom de père à ce prêtre inconnu, la jeune fille très émue songeait à son propre père mort sur l’échafaud 2 ans plus tôt ! Les révolutionnaires continuent leur recherche : « Citoyenne, disent-ils à Mère Marron, nous voulons le prêtre qui est entré chez toi ce matin », « Cherchez-le » leur répond-elle tranquillement, et ils vont et viennent dans le salon où le « bon campagnard » cause toujours avec « sa fille » ! Ils se retirèrent désappointés, furieux de s’être dérangés en pure perte.
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Partout où le Révolution les trouva, les sœurs dépouillées de tout, dispersées, dénoncées, poursuivirent leur mission.
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